
Le journalisme naquit, au temps de Théophraste Renaudot de l’envie des Princes d’avoir à leur disposition d’habiles thuriféraires. Les Princes existent toujours et se pressent dans les allées dorées du pouvoir tous ceux qui pensent politiquement correct et affirment haut et fort que le Prince a tout juste. Or, les Princes sont comme les autres hommes, ils ont parfois tout juste et parfois tout faux. L’honneur du journaliste est d’être suffisamment libre d’esprit pour n’être pas inféodé ni au Prince, ni à ses détracteurs. "Fors la liberté de blâmer, disait Beaumarchais, il n’est point d’hommage flatteur". Dans notre époque de chaînes d’information continue, de fake news, de controverses permanentes et de bien penser généralisé, il était temps d’ouvrir le dossier de la censure. Non seulement celle qu’Eugène Sue baptisa Anastasie en référence à son personnage des Mystères de Paris , mais le dossier de toutes les censures : celle qui prétendit interdire aux poètes de prendre quelque licence, celle qui s’adressa aux mœurs et prétendit les régenter, celle qui dicta sa loi au nom de Dieu, celle qui coupa les vivres à ceux qu’elle prenait pour ses ennemis, celle qui tissa l’histoire de la presse et traîna les journalistes devant la XVII° Chambre Correctionnelle, celle qui interdit d’envoyer des lettres, celle qui ordonna d’écrire que l’Allemagne allait gagner la guerre, celle qui fut utile à Mirabeau, Théveneau de Morande et consorts et leur permit de constituer leur pécule grâce aux horreurs jamais distribuées qu’ils écrivaient sur Marie-Antoinette, celle qui fut bousculée par la Révolution, mais envoya tout de même les écrivains à l’échafaud, celle qui rendit impossible la parution de l’Idiot International et tua (peut-être) Jean-Edern Hallier. Bref, jusqu’au 14 juillet prochain, il sera question tous les dimanches à 17 h au château de Mongenan à Portets des Aventures d’Anastasie. La censure comme si vous y étiez, la censure qui bloque vos envies, qui paralyse vos instincts, qui vous interdit d’être vous-même, jusque dans les moments les plus intimes de votre moi. C’est la raison pour laquelle Florence Mothe, dans la première conférence qu’elle donnera le 28 avril, rappellera ce que Freud a écrit dans "Totem et tabou". Sommes-nous le fruit de nos interdits ? Comment se sont-ils constitués ? Comment avons-nous érigé nos idoles ? Et si la censure nous renvoyait à nos peurs enfantines ? Décidément, que nous le voulions ou non, nous sommes tous, quelque part, les petits fils d’Anastasie.
Château Mongenan
33640 Portets Retour ligne automatique
tel : 05 56 67 18 11, visite à partir de 14 h
Dimanche 28 avril : conférence à 17 h, suivie de la dégustation gourmande des vins du domaine, entrée 10 €.
Totem et Tabou, Freud avait-il tout compris ?
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