Dermatose nodulaire à Bordeaux : agriculteurs en colère et routes bloquées

La dermatose nodulaire contagieuse, maladie virale qui touche les bovins, continue de susciter une forte inquiétude dans le monde agricole. À Bordeaux et en Gironde, ce mardi 16 décembre, la colère des agriculteurs se traduit par des blocages routiers, alors que les éleveurs contestent l’abattage systématique de leurs troupeaux et redoutent une aggravation de la situation à l’approche du printemps.



La dermatose nodulaire, une maladie bovine sous haute surveillance

La dermatose nodulaire contagieuse (DNC) est une maladie virale réglementée qui affecte exclusivement les bovins. Elle se caractérise par une fièvre élevée, l’apparition de nodules sur la peau, une dégradation rapide de l’état général des animaux et une baisse importante de la production laitière. Dans certains cas, la maladie peut entraîner la mort ou rendre l’animal impropre à la production.

La DNC n’est pas transmissible à l’homme, ni par contact direct ni par la consommation de viande ou de lait. En revanche, ses conséquences économiques peuvent être lourdes pour les exploitations touchées.

La transmission du virus se fait principalement par des insectes piqueurs (moustiques, mouches), mais aussi via les déplacements d’animaux infectés. Les conditions climatiques jouent donc un rôle clé dans la diffusion de la maladie. En hiver, la circulation est habituellement plus faible, en raison de la baisse de l’activité des vecteurs. La situation actuelle interroge donc fortement les éleveurs et les autorités sanitaires.

Abattage systématique : une mesure au cœur de la contestation

Pour tenter d’endiguer la propagation de la dermatose nodulaire, l’État a mis en place un dispositif sanitaire strict. Celui-ci prévoit notamment :

l’abattage total des troupeaux dès la confirmation d’un cas ;

la création de zones réglementées, avec des restrictions de circulation des animaux ;

le déploiement de la vaccination dans les périmètres définis par les services vétérinaires.

Ces mesures, jugées nécessaires par les autorités sanitaires, sont vivement contestées par une partie du monde agricole. De nombreux éleveurs dénoncent une réponse qu’ils estiment disproportionnée, en particulier lorsque l’ensemble d’un troupeau est abattu alors que seuls quelques animaux sont atteints.

Au-delà de la perte économique immédiate, les agriculteurs évoquent un choc humain et professionnel, lié à la destruction de cheptels constitués sur plusieurs années. Les questions liées aux indemnisations, jugées parfois insuffisantes ou trop lentes, alimentent également le mécontentement.

FNSEA et Coordination rurale : des colères communes, des lignes différentes

Si la gravité de la maladie fait consensus, les organisations agricoles n’expriment pas les mêmes critiques sur la gestion de la crise.

La position de la FNSEA

La FNSEA, syndicat majoritaire, reconnaît la nécessité d’une réponse sanitaire forte face à une maladie réglementée au niveau international. Elle ne remet pas en cause le principe des mesures de lutte, mais dénonce :

  • une application trop rigide et uniforme de l’abattage, sans adaptation suffisante aux réalités locales ;
  • un manque de visibilité pour les éleveurs sur la stratégie à moyen terme (vaccination, durée des restrictions, sortie de crise) ;
  • des indemnisations jugées incomplètes, notamment pour les pertes indirectes comme la reconstitution des cheptels ou l’interruption de production.

La FNSEA appelle à sécuriser économiquement les exploitations touchées afin d’éviter des cessations d’activité.

La position de la Coordination rurale

Dermatose nodulaire à Bordeaux
Le barrage agricole A63, au niveau de Cestas, au sud de Bordeaux
© Photo Patrick Delhoume

La Coordination rurale adopte une ligne plus radicale. Elle conteste directement :

  • le principe même de l’abattage systématique, jugé disproportionné lorsque peu d’animaux sont infectés ;
  • une gestion perçue comme déconnectée du terrain, laissant peu de place au dialogue avec les éleveurs ;
  • une stratégie sanitaire jugée incohérente, alors que la maladie circule en hiver, période habituellement moins favorable aux insectes vecteurs.

La Coordination rurale relie également la crise de la dermatose nodulaire à un ras-le-bol plus global, lié à l’accumulation des normes et contraintes pesant sur l’élevage français.

La crainte d’une reprise au printemps

L’une des principales inquiétudes exprimées par les éleveurs concerne l’avenir proche. Si la dermatose nodulaire circule déjà en hiver, qu’en sera-t-il lorsque les températures remonteront ?

Les spécialistes rappellent que le risque de propagation augmente avec le retour des insectes vecteurs au printemps et en été. Si la vaccination est présentée comme un levier essentiel pour limiter ce risque, les agriculteurs demandent davantage de visibilité et d’anticipation, tant sur le plan sanitaire qu’économique.

Mercosur : le sentiment d’une « double peine »

À cette crise sanitaire s’ajoute un contexte politique et commercial tendu. Le projet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur suscite une forte inquiétude dans le monde agricole français.

De nombreux éleveurs dénoncent une concurrence jugée déloyale, avec des produits importés soumis à des normes sanitaires et environnementales différentes. Dans ce contexte, la dermatose nodulaire renforce le sentiment d’une double peine : des contraintes très strictes en France, combinées à l’ouverture accrue des marchés.

À Bordeaux et en Gironde ce mardi 16 décembre : axes bloqués et mobilisation

En Gironde, la colère agricole se matérialise par des actions de protestation sur le réseau routier.

Les axes concernés

Autoroute A63, au niveau de Cestas, au sud de Bordeaux :
un barrage agricole est en place, perturbant fortement la circulation sur cet axe stratégique reliant Bordeaux au bassin d’Arcachon et au Pays basque.

Réseau secondaire autour de Cestas :
les blocages sur l’A63 entraînent des ralentissements et reports de trafic sur les routes départementales voisines.

À ce stade, aucun chiffre officiel précis n’a été communiqué concernant des foyers confirmés de dermatose nodulaire en Gironde. Les services de l’État et les vétérinaires sanitaires assurent toutefois un suivi renforcé de la situation.

Une crise sanitaire aux répercussions durables

Entre gestion sanitaire, inquiétudes économiques et tensions politiques, la dermatose nodulaire s’impose comme l’un des dossiers agricoles majeurs de cet hiver. À Bordeaux comme ailleurs, les agriculteurs demandent avant tout des réponses claires, une stratégie lisible et une reconnaissance de la réalité du terrain, alors que les semaines à venir seront déterminantes pour l’évolution de la crise.

Ecrit par Jean-Sébastien Dufourg

Créateur du site Bordeaux Gazette et Président de l’association.


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