Bordeaux
Après « Les îles du santal » et « La rive sombre de l’Ebre », Serge Legrand-Vall est venu présenter dans les salons de la librairie Mollat, son troisième roman « La part du requin ». La notoriété de l’auteur ne faisant que se renforcer, c’est en présence d’un très nombreux public qu’a eu lieu, le jeudi 12 février, cette intéressante rencontre.
Aux Marquises
Prolongement pour les initiés du premier roman de l’auteur, « Les îles du Santal », « La part du requin » se déroule aux îles Marquises en 1846 lors de l’arrivée simultanée de la Marine Française et d’un baleinier. Inspiré jusque-là par les écrits des navigateurs et visiteurs, Serge Legrand Vall s’est cette fois, rendu sur place afin de visiter et de s’imprégner de la vie et de l’histoire des Marquises. L’ouverture d’un atlas m’avait toujours donné envie d’aller dans les îles du Pacifique nous confiera-t-il, et d’ajouter pour lui l’importance des lieux : « lieux qui m’inspirent au moins autant que les personnages ».
Le propre des Marquisiens c’est la disparition et l’oubli dit-il, l’histoire des Marquisiens à l’évidence, résonne en Serge Legrand-Vall, histoire de quelque chose qui se délite, d’une société traditionnelle, société de magie et de répétition, dont la partie immuable ne cesse de perdre de son contenu.
La confrontation des cultures
Au travers de ses personnages, dont Alban en deuil de sa femme morte de la tuberculose est en pleine déprime et a la vision d’un requin qui mange son cœur, ce qui l’empêchera désormais d’aimer et ses deux enfants métis attirés par le monde des blancs, la confrontation va aussi être brutale entre les équipages français et les Marquisiens. Ces deux sociétés ont leurs violences (anthropophagie aux Marquises), mais, au-delà, exercent une évidente fascination l’une sur l’autre. J’avais envie, à travers ce roman, d’avoir le regard de l’autre, j’ai essayé de me mettre dans la peau d’un Marquisien, car, selon moi, toutes les civilisations se valent. Aucune hiérarchisation n’est possible, ajoutera-t-il avec conviction.
L’Avenir des Marquises
Regard en contre-champ de Taïpi roman autobiographique de l’américain Herman Melville, le roman de Serge Legrand-Vall évoque clairement la magie, le rapport à la terre, aux morts, aux disparus, autant de sujets qui passionnent l’auteur et qu’il évoque avec beaucoup de sensibilité. Et de poursuivre, comme pour confirmer cette passion, qu’à la fin du 18èmè siècle il y’avait 100.000 habitants sur l’ile et désormais 2000, que la quasi-totalité des danses traditionnelles (70) ne sont plus connues, et qu’après une époque où la colonisation a fait perdre à ces « cannibales » leur identité, un mouvement en charge de faire renaître la culture Marquisienne, né en 1968 et dynamisé sous la houlette de Lucien Kemitété (disparu en mer en 2002) est en train d’y parvenir. Un festival de culture Marquisienne est désormais en place.
L’auteur nous apprendra aussi qu’un bateau bien de chez nous, appelé « le bordelais », étant allé chercher du bois de santal aux Marquises avait laissé le nom de « Canal du Bordelais » à un canal situé entre deux iles
Un public silencieux, intéressé et attentif, beaucoup de monde à l’heure des dédicaces, une soirée de qualité, un auteur qui rassemble de plus en plus de monde …..
La part du Requin
Serge Legrand-Vall
Elytis, Bordeaux
296 pages
EAN13 : 9782356391483
20 €

Ecrit par Dominique Mirassou
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