Alors qu’une grande partie des électeurs du Front national est issue des milieux populaires, il est évident que leur choix lors des élections n’est pas dû à une adhésion claire et nette aux positions traditionnelles de l’extrême droite. Confrontés le plus souvent à la précarité et à la crainte du lendemain, ils ne font que trouver dans le discours du Front National un sentiment de protection avec peut-être la solution à leur grande fragilité matérielle, et sont de plus en plus nombreux à le ressentir ainsi. Inutile, alors que le mouvement ne cesse de s’amplifier, de revenir sur les multiples analyses toutes aussi complexes que stériles et sans fin dans lesquelles se complaisent une nuée de commentateurs « spécialisés », pas plus que sur la pertinence du choix des électeurs frontistes, les causes de ces choix, les périls et dangereux excès des extrêmes sont connus, le traitement préventif apparemment beaucoup moins.
Comme à chaque élection depuis quelques années, face à la menace frontiste au second tour, c’est à l’appel au fameux « front républicain » que nous sommes confrontés et invités, à l’appel à vaincre le fascisme, et pour certains à travers ça, à l’appel opportun pour sauver leur siège. Moment de bravoure pour de nombreux élus profitant de l’occasion pour s’adresser avec force et conviction aux milieux populaires, pour déclarer la patrie en danger, et donner à leurs déclarations et à leur présence une solennité et une importance capitales.
S’il ne s’agit ni de nier, ni d’ignorer les risques encourus par l’importante montée des extrêmes, s’adresser ainsi aux Français , à des gens qui éprouvent souvent un grand sentiment d’abandon, au moment des élections, pour leur demander de sauver la patrie en danger, devient quelque peu ridicule. Depuis le temps que les scores du F.N. augmentent malgré les appels à ce fameux front républicain, il serait peut-être temps de se poser les bonnes questions, d’autant que 50% des Français ne sont pas devenus fascistes.
Si le rappel historique des horreurs engendrées par l’avènement de mouvements extrémistes est nécessaire et riche d’enseignements, il est assez stupéfiant de constater combien est sommaire l’analyse ou du moins la mise en lumière des causes actuelles de cette montée des extrêmes dans notre société. Que dire par ailleurs de la très discrète recherche des remèdes …. Inutile de s’appesantir sur des sujets qui fâchent diront certains et de s’attarder sur les carences et le manque de caractère de nos dirigeants. De là à penser qu’un appel au front républicain de la part de ceux que le FN qualifie d’UMPS serait cohérent vis-à-vis d’un électorat qui justement se défie de cet amalgame UMPS, il y a un pas difficile à franchir. De quoi combattre l’extrémisme de droite par le petit bout du canon tout en préservant ses positions électives, telle est la réalité de ce front républicain. Il n’en demeure pas moins peu probable que cette posture de « salut public » mais aussi et surtout, malheureusement de « circonstance » puisse suppléer bien longtemps la faiblesse du pouvoir, tous partis confondus.

Ecrit par Dominique Mirassou
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