Bordeaux
C’est sous un titre qui peut sembler un peu racoleur "Prostitution : une économie de marché" qu’a eu lieu ce colloque dans un cadre d’information, de prévention, de proximité et d’orientation face au phénomène de la prostitution. Il semble bien que le gouvernement ait pris la position d’emboîter le pas des abolitionnistes totalement manipulés par la Suède à travers le programme Daphné et les groupes de pression qui se manifestent au niveau des instances européennes.
Même si le Conseil Régional avait ouvert ses portes pour ce colloque on sent bien, combien les politiques sont mal à l’aise dans ce type de débat du fait même de leur absence. Le phénomène dans son ampleur intéresse toutes les couches de la société avec plus ou moins d’intensité et c’est toujours très délicat d’aborder le sujet. On ne peut que constater que nos gouvernants ont apparemment pris une position de principe avant toute étude approfondie et sérieuse de la question du style de ce qui s’est passé pour le "mariage pour tous" cédant à des groupes de pression.
C’est vrai que s’il y a un problème qui divise c’est bien celui là entre le prohibitionnisme, le réglementarisme et l’abolitionnisme. Le courant abolitionniste actuel conçoit la prostitution comme une oppression et une violence envers les femmes. On parle aujourd’hui de néo-abolitionnisme ou d’abolitionnisme féministe, dont l’objectif est la disparition du système "prostitutionnel". Les abolitionnistes refusent toute réglementation, celle-ci ne pouvant que cautionner l’existence de la prostitution, et proposent une série de mesures permettant aux personnes prostituées d’en sortir, mais tout le monde ne veut pas forcément en sortir. C’est ce chemin que voudrait emprunter la France de manière unilatérale en s’attaquant aux clients sans aucune concertation avec les associations au cœur du problème. La Suède est l’un des pays les plus avancés en matière d’abolitionnisme mais la prostitution s’est déplacée, sur Internet notamment. Selon Morgane Merteuil qui lutte activement contre la "putophobie" et milite pour la reconnaissance légale du travail sexuel, secrétaire générale du Syndicat du travail sexuel (Strass), « la loi en Suède n’a pas du tout diminué la prostitution mais seulement le prix des passes. La pénalisation des clients oblige les prostitué(e)s à se cacher, elles et ils sont plus isolés et donc exercent leur travail dans un environnement plus dangereux ». En ce qui concerne la Suède qui n’est séparée que de 6 kilomètres entre Helsingborg et Helsingør au Danemark où la prostitution est légale les Suédois sont devenus de très, très gros clients pour le Danemark. En ce qui concerne la Finlande la loi est aussi beaucoup plus permissive en matière de prostitution qu’en Suède voisine. Il ressort de tout ça qu’il s’agit d’une vaste empoignade européenne ou chaque pays à sa propre philosophie mais qu’à travers les institutions européennes la Suède voudrait imposer son point de vue.
Lors de ce colloque ou Naïma Charaï seule politique présente a accueilli les participants, la directrice d’ippo, Anne-Marie Pichon a introduit la journée, pour elle la précarité avance dans le domaine de la prostitution comme dans tous les domaines en France et elle voudrait que s’installe un débat de fond à partir du terrain avec des chercheurs et des universitaires sur la prostitution. Dans ce colloque il ne s’agissait pas de trancher sur le bien fondé des positions abolitionniste, réglementariste ou prohibitionniste qui traversent les débats actuels autour du projet de loi sur la pénalisation des clients. Le propos était de donner corps aux enjeux multi-factoriel dans lesquels se trouvent enfermées les personnes prostituées aujourd’hui. Durant ce colloque Françoise Guillemaut, docteur en sociologie, Anne Bouillon, avocate au Barreau de Nantes et Norbert Campagna docteur en philosophie sont intervenus. Ce qu’il faut combattre avant tout c’est le trafic des êtres humains quelque soit le contexte envisagé.

Ecrit par Bernard Lamarque
Co-fondateur de Bordeaux Gazette
Recherche
Sur le même sujet
Bordeaux Gazette Annuaire
