Bordeaux
Heureux d’être devant un nombreux public bordelais, Philippe Dessertine a tenu sous le charme son auditoire pendant plus de une heure trente. Plus que d’économie au sens strict, il est venu parler de son dernier livre dont il a fait la synthèse du contenu. Pour lui la France a des atouts mais il ne faut pas louper les révolutions qui sont en cours.
C’est à la fois un message d’espoir et une mise en garde qu’a délivré Philippe Dessertine lors de cette soirée. Il a entamé son propos en faisant allusion à une chanson de Vincent Delerme "Les filles de 73 ont 30 ans" pour dire que les nouveaux millionnaires aujourd’hui comme Mark Zuckerberg ont 30 ans et que ce dernier a donné un cours d’optimisme au premier e-G8 tenu à Paris en remplaçant au pied levé Steve Jobs. Le conférencier a voulu ainsi montrer qu’un nouveau monde est en train de naître, ce monde n’est plus celui des années 50 et des "30 glorieuses"mais il est analogue à celui des deux grandes révolutions à savoir la révolution industrielle du XIXème et celle de l’électricité du XXème. Un nouveau monde est en préparation face aux évolutions de la planète et le défi est d’appréhender le monde de demain, car si nous ne sommes pas capables de changer dans les 10 ans la planète explosera sous le poids de sa démographie, de nos modes de vie et des changements climatiques.
En fait pour Philippe Dessertine on est face à quatre révolutions simultanées :
La révolution agricole : donner à manger et à boire aux futurs milliards d’individus présents sur le globe dans quelques années est un enjeu majeur et les enjeux sont fondamentaux autour de la haute technologie avec une agriculture de précision. Ce secteur va demander des investissements colossaux et sera le secteur clé des prochaines années.
La révolution du génome : La génétique prend une part prépondérante dans le monde et des biothèques géantes se constituent dans le monde avec en pointe La Silicon Valley en Californie, Israël et New-York avec Brooklyn. Trois types de biothèques se développent les rouges autour de la vie, les vertes autour de l’agriculture et les blanches autour des objets.
La révolution énergétique : A une période on a considéré que les énergies fossiles étaient en voie d’épuisement et qu’il fallait passer à la transition énergétique avec des énergies qui ne mettent pas en danger la planète mais le problème du gaz de schiste est venu bouleverser la donne et il confère un avantage concurrentiel énorme au bloc Mexique, Etats-Unis, Canada qui estime ses réserves à 200 ans de production, sauf qu’on ne sait pas trop où on va.
La révolution numérique : C’est surement la révolution la plus importante et il semble bien que nous ayons raté la première, une seconde se profile, il ne faudrait pas la manquer. C’est celle des "Big Data" (gestion des données), imprimantes 3D (robotisation avec des perspectives abyssales) et "Fab Lab" (lieu ouvert au public où il est mis à sa disposition toutes sortes d’outils, notamment des machines-outils pilotées par ordinateur, pour la conception et la réalisation d’objets)
Pour Philippe Dessertine il est primordial de ne pas manquer ces rendez-vous sous peine d’être disqualifié dans la course au progrès. Selon lui, il faut retrouver l’esprit des années du début du siècle dernier avec des créateurs de la trempe de Renault ou Peugeot qui étaient les Zuckerberg de l’époque, et renouer avec le plaisir du travail. L’économiste réapparaît pour préciser "pour cela il faut libérer une partie des liquidités disponibles".Venu pour promouvoir son dernier livre "En tout espoir de cause" il y dresse dès les premières pages un diagnostic pertinent : "Conservateurs et réactionnaires n’ont pas de couleur politique, ou plutôt si, ils peuvent être de droite comme de gauche, extrêmes bien sûr, mais pas seulement. Ils peuvent avoir déjà beaucoup vécu, beaucoup accumulé, ou au contraire être des jeunes ayant seulement l’ambition de remplacer leurs aînés. L’aspiration au confort est naturelle, on peut être vieux dès la jeunesse. Soudain la marche en avant semble compliquée. Et si les riches vieillards du monde d’avant empêchaient l’émergence du monde d’après ?" La crise est génératrice de repli sur soi et c’est elle qui a porté au pouvoir des Hitler et des Mussolini. L’’échec est interdit.

Ecrit par Bernard Lamarque
Co-fondateur de Bordeaux Gazette
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