Bordeaux
Associée dans l’imaginaire de notre ville au loup et même au loup-garou ou encore au loup blanc, la rue du Loup, bien connue de tous les bordelais, a vu de nombreux spécialistes s’affronter et même se disputer sur l’origine de son nom sans qu’aucun ne convainque vraiment quant à ses convictions. De nombreuses hypothèses subsistent …..
La terreur du loup au Moyen Âge
Au Moyen Âge, la seule pensée du loup terrifiait la population, tant son image de monstre, de bête féroce était ancrée dans les mentalités. En tant que bouc émissaire du malin, une fois capturé, il était quelques fois jugé et condamné au bûcher. Ses prétendus pactes avec le diable, sa présence auprès des sorcières qui les chevauchaient pour se rendre au sabbat, ses attaques contre les enfants apeurés, constituaient autant d’histoires sordides qui se répandaient de village en village.
Par temps de famine, les loups poussés par la faim allèrent jusqu’à entrer dans les villes et les villages, « Le loup aime la chair humaine » disait-on, avec une préférence pour les enfants qui « ont la chair plus tendre ».
Suite aux nombreuses famines de l’époque, la peur du loup ne fit que grandir, et c’est ainsi que par leur nombre, leur force, leur pugnacité, les loups marquèrent le Moyen Âge dans toute l’Europe. Les enfants de Bordeaux et d’ailleurs avaient tous peur lorsqu’on leur parlait, selon la rumeur, « d’un loup colossal au pelage gris, presque blanc, qui avait mangé deux enfants, dévoré le bras d’une femme, étranglé tous les chiens de garde du pays et qui pénétrait sans peur dans les enclos pour venir flairer sous les portes ».
La rue du « Loup »
Dans ses ouvrages sur Bordeaux au XVIème siècle, Elie Vinet pense que ce nom de « rue du Loup » pourrait avoir été donné en hommage à un Biturige Vivisque nommé Lucius Lupus.
Selon Gabriel de Lurbe, procureur-syndic de la Jurade qui publia en 1594 La Chronique Bourdelaise, la rue du Loup évoquerait l’incursion spectaculaire des loups à Bordeaux en 582 :" Les loups en plein midi étant entrés en la ville de Bourdeaus, dévorent à la vue du peuple les chiens en pleine rue et de là Bordeaus fut dite ville des loups. Et il y’a encore pour aujourd’hui une rue appelée rue du Loup".
Le chroniqueur Pierre Bernadau n’est pas d’accord et affirme que le nom de la rue n’est pas antérieur au XVème siècle ; selon lui il y’avait dans cette rue de nombreux pelletiers et l’un de ces marchands avait comme enseigne un vieux loup empaillé d’où le nom de la rue.
Le loup-garou de la rue de l’Observance
La rue de l’Observance était ainsi nommée parce qu’elle conduisait à la porte d’entrée du couvent des Cordeliers appartenant à la congrégation de la Grande Observance. La légende nous dit que, dans ce couvent, fut enfermé pour y être instruit et éduqué un prétendu loup-garou dans les années 1600.
Il s’agissait d’un individu d’une quinzaine d’années, nommé Jean Grenier, qui, à l’en croire, avait mangé des enfants dont il trouvait la chair savoureuse et avait blessé plusieurs adultes. Il disait tenir du diable une peau de loup qui lui donnait certains privilèges et dont il se débarrassait à volonté en la jetant sur les toitures.
Arrêté ou attrapé plutôt, le loup-garou fut traduit devant un tribunal qui le condamna à être pendu et étranglé puis son corps, brûlé et réduit en cendres. Finalement considéré comme un faible d’esprit et non comme une créature du diable, l’anthropophage fut simplement enfermé jusqu’à sa mort en 1610 dans le couvent de l’Observance où on allait le visiter comme une bête curieuse !!!
Malgré de nombreuses légendes bordelaises concernant des loups, loups blancs et autres loups-garous, notre rue du Loup gardera son mystère quant à l’origine de son nom, et l’on parlera certainement encore longtemps de l’intrusion sanglante des loups dans notre ville en 582.
Source : Contes et Légendes du Vieux Bordeaux Michel Colle

Ecrit par Dominique Mirassou
Recherche
Sur le même sujet
Bordeaux Gazette Annuaire
