Bordeaux
C’est un conte flamboyant et coloré, un régal pour nos yeux émerveillés … Le bouquet final d’un beau feu d’artifice qui clôt sur une standing ovation d’un public enchanté cette saison de notre théâtre National Bordeaux Aquitaine …
« Le metteur en scène colombien revisite le mythe de Psyché avec cette exubérance baroque qui n’appartient qu’à lui . » Vénus, déesse de la beauté, en est jalouse … ! Afin de se venger de cette concurrente, elle envoie son fils, Cupidon, décocher une flèche à Psyché. Cette flèche est censée la faire tomber amoureuse d’un homme particulièrement laid ! ... Mais l’histoire prend une toute autre forme car en voyant la princesse, Cupidon tombe amoureux. Dés l’entrée dans le théâtre la scénographie de Fredy Porras, fumées enveloppantes, danses tribales autour d’un feu de camp comme un rituel du fond des âges, totem fait de branches dénudées, cris et musiques, terre brune recouvrant le plateau, nous surprennent, nous enchantent … Nous allons vivre une fête ! Puis le feu s’éteint, le rituel d’un autre âge s’estompe et s’évanouit derrière les mosaïques de voiles légers et cyclo transparents qui, grâce à la machinerie à vue, nous transporte à la cour baroque du palais …
Et là comme celles de « la perpétuelle indulgence » dans leur accoutrement en cornettes et perruques poudrées, maquillées à outrance, les deux méchantes sœurs - Philippe Gouin et Jonathan Diggelmann - jalouses de Psyché, hilarantes, burlesques, nous basculent dans une esthétique folie picturale kitsch et joyeuse, sonore et imagée, dont on ne se lassera pas … De la salle au plateau, ou volant dans les cintres sous l’orage et le tonnerre grondant on est emporté, propulsé dans la magie de cette histoire de jalousie et de désirs refoulés abracadabrantesques sans jamais être lassés durant cette heure quarante cinq de folies maîtrisées, bondissantes et talentueuses réglées au millimètre. Jeanne Pasquier, jeune et lumineuse comédienne genevoise qui joue Psyché ne parvient pas, hélas, au-delà du dixième rang de la salle Vitez ( j’étais placé au 16 ème ) à donner assez de voix, malgré la technique amplifiée, dans l’intensité sentimentale du monologue éploré quand, poussée par la curiosité, la jeune mortelle a perdu son dieu aimé en découvrant sa vraie identité, c’est dommage.
La fête, la gaieté heureusement s’imposent et les costumes fantaisistes, inventifs, surprenants d’Elise Vuitel y contribuent. Le duo de princes (Karl Eberhard et Juliette Vernerey) piégés dans un vrai coup de théâtre programmé est aussi à remarquer. Enfin lorsque Vénus défie la mortelle qui lui a ravi son fils Amour, Emmanuelle Ricci, belle et magistrale, mi-déesse, mi-sorcière, avec son rire de gorge et les gifles qu’elle administre à distance est étincelante.
Ce théâtre là on en redemande !
D’après Molière, La Fontaine, (livrets d’opéra) et le récit original du latin Apulée
TnBA Grande salle Vitez

Ecrit par Pierre Chep
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