Toutes et tous, quels que soient les cultes, faisons bloc à tous les niveaux contre le terrorisme

Ce Mercredi 07/01/2015 vers 11h.30 alors que se tenait, dans la bonne humeur coutumière, la réunion hebdomadaire de rédaction de Charlie Hebdo, trois hommes brandissant des armes de guerre automatiques ont fait irruption en hurlant « Allah wakbar ! » dans les locaux du 11e arrondissement de Paris. Dans un bruit d’enfer, la mitraillade à bout portant, qui a suivi, n’a pitoyablement laissé que des impacts de balles aux murs, des douilles au sol, une mare de sang, 12 personnes tuées, plusieurs autres blessées dont quatre, grièvement. Les auteurs de cet attentat, le plus sanglant en France depuis 1961, ont été identifiés. L’un d’eux, le plus jeune, s’est rendu aux services de Police tandis que les deux autres en fuite, les frères Kouachi, ont été abattus après s’être retranchés dans une imprimerie à Dammartin-en-Goële.



Parmi les victimes, les dessinateurs emblématiques, Wolinski, Cabu, Charb, Tignous et Honoré, constituaient les piliers satiriques du dessin de presse français. Rappelons que Cabu a été pour toute une génération, dans les années 80, le père du « Grand Duduche » et du « Beauf » ainsi que le dessinateur de Récré A2. Avec sa coupe au bol et ses binocles rondes, il caricaturait à grands traits d’humour taquin, en direct sur le plateau de télévision de cette célèbre émission pour enfants, la piquante Dorothée au nez pointu et à la queue de cheval en bataille.

Se trouvaient également parmi les victimes, l’économiste Bernard Maris, chroniqueur sur France Inter, Michel Renaud, le fondateur du festival "Rendez-vous du carnet de voyage" ainsi qu’Elsa Cayat, une psychanaliste qui tenait une rubrique bimensuelle dans le journal et Mustapha Ourrad, correcteur.
De sources syndicales, le premier des deux policiers tués a été le brigadier Franck Brinsolaro, chargé de la sécurité de Charb, menacé depuis l’affaire des caricatures de Mahomet en 2005. Le second, Amed Merabet, a été tué dans la rue lors d’un échange de tirs au moment de la fuite des djihadistes. La dernière victime connue était Frédéric Boisseau, un employé qui s’occupait de la maintenance d’un local situé à proximité.

Jeudi 08/01/2015 en début de matinée, c’est une policière municipale de Montrouge (Hauts-de-Seine), Clarissa Jean-Philippe âgée de 26 ans qui a été sauvagement abattue lors d’une fusillade en pleine ville selon toute vraisemblance par le terroriste Amedy Coulibaly.

Dans l’après-midi du Vendredi 09/01/2015, ce sont quatre membres de la communauté hébraïque, Yoav Hattab, Yohan Cohen, Philippe Braham et François-Michel Saada, qui ont été pris en otage alors qu’ils faisaient tranquillement leurs courses dans une supérette « Kasher » de la porte de Vincennes à Paris. Le même Amedy Coulibaly les a sauvagement assassinés avant d’être lui-même éliminé, lors de l’assaut mené finalement par les forces de Police.

Au-delà de la stupeur suscitée par cette effroyable boucherie causant dix sept morts en trois jours, il convient évidemment de prendre conscience qu’il s’agit d’une atteinte fondamentale, à la liberté de la presse, aux services d’ordre, à la religion juive et, par conséquent, à toute la population française en général. En effet, la préservation de la « vox populi », le respect des services assurant notre sécurité et la libre diversité cultuelle, sont significatives des valeurs humanistes qui régissent notre Démocratie laïque. De leur côté, avec leur esprit rebelle incorrigible, nos sympathiques caricaturistes exprimaient la lutte ouverte contre la pensée unique, par la dérision. Leur regard satirique perpétuait, avec un clin d’oeil caustique, la tradition exacerbée des « philosophes des lumières » dans leur opposition aux relents d’obscurantisme oppressif que le clergé et la noblesse avaient fait subir au peuple jusqu’à la Révolution française. Après la disparition de « Fluide glacial » et de « Hara Kiri », ils restaient avec le « Canard Enchainé », les « Guignols » et « Canteloup » une des voix médiatiques grâce à laquelle nul ne peut impunément abuser des droits fondamentaux de chacun : « sans se faire foutre joyeusement de sa gueule ! »

N’est-il pas nécessaire toutefois de se demander, avec le recul indispensable au respect des valeurs citoyennes, si ce n’était pas aller un peu loin que de moquer vertement sans retenue le caractère sacré de n’importe quelle obédience ? N’y avait-il pas là une face sombre de Charlie Hebdo, discutable dans sa tendance anarchiste non respectueuse d’autrui et donc finalement pas si humaniste que ça ? N’appartient-il pas à la laïcité, elle, qui condamne tous les fanatismes, de ne pas aussi sombrer dans l’extrémisme ? Connaissant la ferveur ardente des passions religieuses qui n’a cessé de déchirer l’humanité, la coexistence pacifique de communautés de confessions diverses dans le cadre d’une république laïque, n’implique-t-elle pas, au nom de l’intérêt général, de réfléchir tous ensemble à la question de savoir si l’on peut impunément tout bafouer.
Ainsi « peut-on rire de n’importe quoi ? ». Par exemple, l’attentat dont ont été victimes nos dessinateurs et les otages de la Porte de Vincennes, est-il risible ?

Réciproquement, sans bien sûr qu’il soit question « d’amalgame », le djihadisme peut-il être aussi facilement exclu de l’Islam modéré que le « politiquement correct » voudrait le faire admettre ? Peut-on continuer de refuser l’évidence qu’il en est l’excroissance effective, en prétendant qu’il n’est composé que d’individus en proie à des problèmes psychiatriques ? Et puisqu’il est dit que l’Islam est une religion tempérante interdisant la violence, n’y a-il pas lieu que la totalité des musulmans respectueux du Coran en Europe, en Afrique du Nord, en Turquie ainsi que dans le reste du monde, et pas seulement une partie d’entre eux en France, condamnent sincèrement ces crimes inhumains avec virulence dans toutes les mosquées ? Ne devraient-ils pas prendre toutes les mesures, internes à leurs communautés, pouvant aider à la cessation d’une telle violence profanatoire perpétrée au nom de leur Dieu ?
Car, en matière de blasphème, ces transgressions gravissimes ne sont-elles pas considérablement pires que n’importe quelles caricatures ?

Quant à la Justice, à la Police française, aux autorités turques et à François Hollande, n’y a-t-il aucune responsabilité de leur part à rechercher dans ses meurtres ?

Le braqueur et trafiquant de drogue Amedy Coulibaly était un multi-récidiviste. Après cinq incarcérations entre 2000 et 2014. n’a-t-il pas été remis en liberté un peu vite, sans surveillance étroite, en 2014 ? Lors de sa comparution en Décembre 2013, comment le Tribunal a-t-il pu juger suffisant, malgré ses lourds antécédents, de ne le condamner qu’à cinq ans de prison pour le projet, pourtant grave, d’évasion avortée en 2010 du djihadiste, Smaïn Ait Ali Belkacemn, ancien membre du Groupe islamique armé algérien (GIA) en vue d’un attentat de grande ampleur.

En réalité au lieu de cinq ans, Il n’a accompli que trois ans et dix mois de prison, de Mai 2010 à Mars 2014, grâce aux remises de peine. Dans la période qui a suivi il a été équipé d’un bracelet électronique dans le cadre des « peines hors les murs ».
Profitant de cette aubaine, il ne restait plus alors à Coulibaly qu’à reprendre, sous une forme ou une autre, son projet d’attentat interrompu. A peine quelques mois après sa sortie de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis (Essonne), comment lui et ses anciens comparses ont-ils pu financer et transporter, au nez et à la barbe des autorités françaises, un arsenal de guerre aussi lourd que volumineux ?
Serait-ce grâce à ce qui pourrait bien avoir été, au moins en partie, un certain laxisme de la part des services judiciaires et policiers, qu’il est ainsi parvenu, à peine libéré, à commettre cinq meurtres en corrélation avec les 12 perpétrés par ses complices, les frères Kouachi ?

En 2010, ces derniers avaient bénéficié d’un non-lieu après avoir été inculpés de complicité aux côtés de Coulibaly dans le projet d’évasion de Smaïn Ait Ali Belkacemn. Pour sa part, Smaïn Ait Ali Belkacem avait été condamné en novembre 2002 à une peine de prison à perpétuité pour sa participation à l’attentat de la station R.E.R. Musée d’Orsay, en octobre 1995.

Au moment de l’ arrestation de Coulibaly en 2010, Hayat Boumeddiene, sa concubine âgée de 26 ans avait, pour sa part, simplement été auditionnée. Actuellement soupçonnée de complicité dans la fusillade de Montrouge, elle fait l’objet d’un avis de recherche international. Elle se serait envolée vers la Syrie via la Turquie puis l’Espagne. Cette filière est connue de longue date, et malgré les engagements des autorités turques d’y remédier impérativement, elle semble toujours fonctionner. Il se pourrait même que Chérif Kouachi ait lui aussi bénéficié du peu de contrôle effectué à la frontière par la douane turque pour sortir de Syrie en 2014, quelques jours avant la mitraillade de Charlie Hebdo. A noter que la Turquie a longtemps soutenu les groupes armés qui sont à l’origine de la constitution du groupe Etat Islamique. De fait, Ankara apparait, à ce jour encore, dans l’incapacité d‘empêcher efficacement le transit des terroristes, bien que la Turquie fasse partie de la coalition anti-organisation Etat Islamique.
De fait, n’y a-t-il pas à rechercher, sérieusement aussi de ce coté, une certaine part de responsabilité afin d’enrayer le fonctionnement criminel de cette filière ?

Enfin, les récentes initiatives guerrières de la France au Mali n’auraient-elles pas impérativement dû attendre d’être menées dans le cadre d’une action collective des états de la communauté européenne sous l’égide de l’OTAN ? Etant donné l’évidence logique des représailles terroristes à prévoir, notre Président pouvait-il ignorer la situation de bouc émissaire du djihadisme dans laquelle il allait plonger tous les citoyens et les citoyennes de l’hexagone. N’avait-il pas d’autres mesures à prendre pour tenter de redresser son pays en faillite, que d’en faire en plus une cible privilégiée du terrorisme international en jouant naïvement au « va-t-en guerre solitaire » contre AQMI ?

En cette période de voeux, espérons tous ensemble et de toutes nos forces, quelques soient nos cultes et nos convictions, que, contrairement aux terrifiantes menaces djihadistes proférées encore dernièrement à l’encontre de la France, ces crimes odieux ne soient pas le début d’autres drames horribles. Face à l’indignation et à la douleur suscitées par ces attentats, la meilleure réaction à avoir a été spontanément le rassemblement pacifiste de plus de trois millions et demi de français scandant, dans l’effroi et la consternation, le slogan : "Je suis Charlie, je suis policier, je suis juif » auquel il convient peut-être d’ajouter simplement : « je suis humain ».

Ecrit par Georges S. Zeiller


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