Bordeaux
L’Intendant Tourny souhaitant offrir aux bordelais un jardin digne de ce nom où ils pourront jouir du plaisir de la promenade, va se heurter au gouverneur militaire qui ne veut pas d’un lieu où les bordelais pourraient se rassembler en cas de révolte, mais également à l’Académie de Bordeaux dont l’immeuble risque d’être déplacé, ce qui fait réagir vivement Montesquieu lui-même.
Naissance du Jardin Public (1746)
Tourny, en quête d’un lieu, récupère un vaste terrain entre St Seurin et les Chartrons, fait arracher les vignes qui s’y trouvent et décide d’y implanter le jardin. Ange-Jacques Gabriel architecte du Roi, propose l’implantation d’un jardin à la française avec huit parterres disposés de chaque côté d’une allée centrale qui débouche sur une pièce d’eau circulaire. Des grilles de fer forgé (toujours présentes) clôturent le jardin, un vaste cours va relier le jardin aux Chartrons (actuellement cours de Verdun). Le Jardin Public est né.
De la prostitution au champ de manœuvre
Les manifestations les plus diverses vont se tenir dans ce nouveau jardin : défilés patriotiques durant la Révolution, fêtes agricoles ou encore Fête de la Fédération des vieillards. Un rapport de police de 1793 signale cependant que le jardin, de plus en plus mal fréquenté, est devenu « le réceptacle de vagabonds et de prostituées », ce qui n’était pas prévu…. Plus tard, en 1808, alors que Napoléon se rend en Espagne pour faire la guerre, les lieux vont servir de champ de manœuvre au 108ème régiment durant plusieurs jours. Conséquences fâcheuses, les fleurs et parterres sont piétinés et détruits au grand désespoir du jardinier.
Une longue période d’abandon avant la renaissance des lieux
Après plusieurs décennies d’abandon durant lesquelles le Jardin Public ne sert plus qu’aux courses de chevaux et aux carrousels militaires, certains pensent même à le supprimer pour y construire des bâtiments administratifs, comme par exemple une nouvelle préfecture. C’est le maire Antoine Gautier, soucieux d’éviter toute spéculation, qui va sauver le jardin, et décider de le transformer en un parc à l’anglaise. De 1856 à 1858 le paysagiste bordelais L.B. Fisher et l’architecte de la ville Charles Burguet vont se charger de cette transformation. Allées sinueuses, pièces d’eau, rivière serpentine, lac, îles et cascade, jardin botanique vont faire leur apparition pour le plus grand bonheur des bordelais.
Des animations permanentes
Alors que jusqu’en 1938 une serre en fonte et fer d’environ 100 mètres (Adrien Marquet ordonnera cette année-là sa démolition car trop vétuste) va abriter les collections des espèces rares en provenance du Jardin botanique, des animations permanentes ont lieu tout au long de l’année pour la joie des visiteurs de tous âges. Un kiosque à musique, une charrette à ânes, un bateau « Le Petit Mousse » qui passe plusieurs fois par jour sous le petit pont, sous l’œil attendri des promeneurs et des canards à l’affût de la moindre mie de pain, attirent beaucoup de monde. Des centaines d’enfants jouent dans les allées et sur les pelouses, et embarquent parfois pour une longue croisière alors que l’éternelle famille Guérin, véritable institution bordelaise, enchante et anime toujours les lieux grâce à la magie de Guignol.
Nostalgie
Devenu le paradis des joggers, le jardin Public garde cependant son attrait malgré la perte des charrettes à âne, et surtout celle de son navire amiral le « Petit Mousse » pour lequel une Association se bat afin que le charmant embarcadère où battaient les petits cœurs ne reste pas définitivement désaffecté, affaire qui semble délicate et à priori trop coûteuse…
Que dire aussi du bâchage succinctement bricolé par le Guignol Guérin pour assurer la délimitation de son emplacement et l’ intimité de ses représentations, sinon qu’il mériterait certainement un léger mieux sans pour autant dépenser une fortune (quelques étudiants talentueux n’auraient-ils pas des idées ???). Autres temps autres mœurs, cependant, même si les sujets d’émerveillement des plus jeunes évoluent, les canards ont toujours autant de succès et la magie du Jardin-Public demeure. Certains anciens et moins anciens s’obstinent à penser qu’avec le « Petit Mousse » ce serait encore mieux !!!
Source : Les Dossiers d’Aquitaine - Collection Mémoire et Patrimoine

Ecrit par Dominique Mirassou
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